La pratique du consensus pour une démarche qualité vivante !

« La question n’est pas de savoir si les membres du groupe ou le chef peuvent prendre les décisions les plus appropriées pour un groupe. Elle est de savoir si le chef, sans les membres du groupe, peut prendre de meilleures décisions que le peut le groupe total incluant le chef » affirmait Thomas Gordon psychologue Américain pour introduire cette réflexion sur les consensus.

Il faut admettre que décider tout seul à partir de son unique point de vue représente un risque majeur, et que les professionnels ne se sentent pas concernés quand la décision leur est imposée d’en haut. C’est un consentement composé d’acceptation active de soi et d’autrui. Le consensus sera d’autant plus profond que le groupe aura pu prendre conscience des concessions faites par chacun dans le but d’aboutir à un accord : il le sera aussi d’autant plus que les membres auront la conviction d’avoir pris en considération le plus grand nombre de solutions possible eut égard à la zone de liberté qui leur est impartie, et au degré de responsabilité qu’ils assument.

Les professionnels ont envie de s’impliquer davantage, d’être considérées comme partie prenante dans la prise de décision, car même claironnée dans l’hôpital, la meilleure décision restera mauvaise, si elle n’est pas appliquée. Ce souci de la mise en œuvre et le temps que prend celle-ci, participent donc de la qualité de la prise de décision. Le consensus développe une intelligence de l’action.

Une fois seul dans sa responsabilité et sa compétence, chacun sera capable de choisir et d’analyser avec la même cohérence que les autres membres de l’équipe parce qu’il aura participé au processus qui a débouché sur la décision finale.

S’il est normal que toutes les décisions ne relèvent pas de la même catégorie, les changements aléatoires de règles du jeu ne sont plus tolérés.

Les règles du jeu consensuel

Un consensus n’est pas un état que l’on atteint une fois pour toutes, mais un processus qui vit : une dynamique, un courant que l’on ne saurait figer.

Chaque professionnel va devoir s’impliquer, d’abord pour créer le consensus, puis pour le faire vivre.

Il ne doit pas se trouver de participants pour rester muets, pour critiquer la décision prise dès la sortie de la réunion.

Sur la pirogue chacun doit embarquer dans de bonnes dispositions et pagayer en cadence avec l’envie d’avancer jusqu’au cap que l’on s’est fixé. Si quelques-uns pagaient à contrecourant ou gardent leur pagaie levée, la pirogue ne peut que partir à la dérive.

Le consensus se construisant par étape, il est inutile de se presser. Le temps consacré à sa construction sera autant de temps gagné sur l’application de la décision, car tous auront été mêlés au processus.

Ils auront eu le loisir de donner leur avis, comme de connaître celui des autres, et de comprendre le sens de la décision finale puisqu’ils l’auront construit eux-mêmes avec les autres.

Il serait abusif de parler de consensus tout en pressant les acteurs par des délais trop courts, à peine suffisants pour ratifier une décision autocratique.

Si le jeu n’est pas défini, comme c’est souvent le cas, la frustration sera générale.

Une vraie décision au consensus se caractérise par quatre facteurs :

  1. A l’issu des discussions toutes les personnes comprennent la décision adoptée.
  2. Elles acceptent de l’appliquer (ou au pire s’engage à ne pas la saboter) et cela pour un temps
    déterminé.
  3. Cette décision ne choque pas leurs valeurs morales.
  4. Chaque personne est satisfaite de la manière dont elle a été traitée au cours des discussions et du processus dans son ensemble, même si ses idées n’ont pas toutes été retenues finalement.

A l’opposé du manipulateur, le manager doit instaurer un climat sécurisant de respect des idées d’autrui, des peurs, des résistances, des divergences.

C’est le plus haut niveau hiérarchique qui peut le plus facilement donner le ton, et sur ses épaules repose en grande partie le succès ou l’échec du consensus.

 

La pratique du consensus pour une démarche qualité qui se pérennise !

Avant d’être une pratique, le consensus est un état d’esprit qui admet que les processus interactifs sont plus riches et plus efficaces que les décisions unilatérales.

Ne sont pas bons les processus de prise de décision au cours desquels les participants ne changent pas, n’évoluent pas dans leurs idées, car il n’y a pas d’enrichissement mutuel, ni surtout d’apprentissage.

Pour le dirigeant, la pratique du consensus est un excellent moyen d’aider un établissement à savoir apprendre et à développer une véritable intelligence collective.

Dans la pratique, comment se déroulent les prises de décisions courantes au consensus ? trois étapes principales sont à respecter :

1. La première étape consiste à s’accorder sur le comment. On parle « méthode » au début de la réunion et ensuite seulement de « contenu ». Il s’agit donc d’arrêter une façon de procéder, un délai et un plan précis pour le déroulement du processus :

    • Tour de table pour recueillir les différentes perceptions du problème.
    • Discussions à bâtons rompus pour élargir le cadre, examiner les aspects qui n’avaient pas été mis en lumière et mieux cerner la définition du problème.
    • Recadrage des priorités pour délimiter le champ sur lequel on va concentrer ses efforts.
    • Choix des critères d’évaluation des solutions, et vote final sur les critères les plus importants.
    • Recherche des éléments constitutifs du problème ainsi délimité : tout au long du processus on s’assurera que tous les avis ont été pris en compte en évitant de trop argumenter dans l’abstrait sur ses idées.

2. La deuxième étape consiste à vérifier l’accord des participants sur le « système de recours » qui sera adopté si le consensus ne fonctionne pas. Vote à la majorité ou décision unilatérale du responsable hiérarchique. Ce n’est pas une menace, mais une stimulation encourageant les professionnels à se montrer immédiatement constructifs.

3. La troisième étape consiste à s’accorder sur le fond, en reprenant chaque phase du déroulement et en respectant les méthodes que l’on s’est fixé pour la progression jusqu’à la décision collective finale. Si le consensus ne fonctionne pas à l’un ou l’autre des stades de la discussion, on revient au stade précédent ou même en amont.

Les faux consensus : les erreurs à ne pas commettre !

La décision au consensus n’est pas une norme. Cette méthode réclame de la précision et du temps. Elle est surtout adaptée pour les sujets complexes qui exigent créativité et forte adhésion collective (réorganisation, tournants stratégiques, vision du futur, choix face à une menace concurrentielle, mise en place d’une démarche qualité, « nouveaux départs »).

Le consensus n’est pas non plus un compromis. A vouloir aller trop vite, le leader tente parfois d’impliquer le maximum de monde et boucle sur accord d’une médiocrité affligeante, et ce parce qu’il n’a pas osé prendre une décision unilatérale, pourtant dans son domaine de compétence, qui risquait de déplaire.

Le consensus n’est pas un alignement sur les idées des autres. Parfois, les participants n’osant pas donner immédiatement leur opinion réelle, commencent par s’aligner sur ce qu’ils imaginent être l’avis général.

Progressivement se dessine une sorte de consensus qui en fait n’en est pas un, puisqu’il repose sur l’incapacité des personnes d’exprimer leur vrai désir et sur une série de suppositions croisées.

Le consensus ne doit pas devenir un vaste forum permanent. A force d’être mêlés à toutes les décisions à tous les niveaux, d’aucuns finissent par penser qu’ils ont le droit de s’exprimer sur n’importe quoi, n’importe quand. Et chacun de croire que son opinion a la même valeur que celle de l’autre, sous prétexte que tous sont assis autour de la même table pour discuter du problème.

Le manager doit être très clair, le management participatif n’implique pas nécessairement la démocratie totale. Avoir le droit de s’exprimer, d’être entendu et de participer ne signifie pas être à égalité de vote sur tous les sujets et dans tous les cas.

Il est donc souhaitable lors de la décision du groupe, de vérifier chez tous les membres la compréhension des conséquences qu’aura pour eux-mêmes et leur entourage « l’engagement » qu’ils vont être amenés à prendre.

Il semble que la décision doit être prise explicitement et si possible avec un caractère de solennité proportionné à son importance dans la vie du groupe.

Il est souhaitable qu’elle soit exprimée à nouveau d’une façon formelle pour pouvoir être intégrée dans la mémoire active du groupe.

En fait la décision du groupe aboutit à la suspension de l’inertie naturelle du groupe. Celui-ci devient capable de mobiliser ses énergies pour entreprendre de nouvelles tâches. Cela modifie son équilibre quasi stationnaire en facilitant l’érosion des normes anciennes et la cristallisation de nouvelles normes.

La décision du groupe est actuellement considérée comme le moyen le mieux approprié à la prévention du phénomène de résistance aux changements.

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